URGENCES UROLOGIQUES

 LA RÉTENTION AIGUË D'URINE

Quelle définition ?


C’est l’impossibilité douloureuse d’émettre les urines alors que la vessie est pleine.

La capacité de la vessie est variable d’un individu à l’autre, mais en général, l’envie d’uriner est déclenchée à environ 300ml de remplissage pour un homme adulte. Si la miction est impossible, la vessie poursuit son remplissage permanent (60 ml/h) sans se vider. C’est la mise en tension brutale du muscle vésical (détrusor) qui provoque la douleur.


Quels symptômes ?


La douleur du bas ventre est extrème et entraîne une certaine agitation. Elle s’associe à l’absence d’émission d’urine depuis plusieures heures et surtout une masse au dessus du pubis, arrondie, tendue et mate à la percussion, (globe vésical).

Le diagnostic repose essentiellement sur l’interrogatoire et l’examen clinique. Il peut, éventuellement, être confirmé par une échographie.


Quelle conduite à tenir ?


Il s’agit d’une urgence urologique. L’intensité de la douleur est là pour le rappeler !

Certains médicaments, les alpha-bloquants, peuvent être efficaces, si pris précocement, mais, en général, il faut avoir recours à un drainage de la vessie en urgence soit par sondage urétral soit par cathéter sus-pubien.

C’est seulement, secondairement, que l’on pourra faire la recherche de la cause de cette rétention aiguë d’urine.

Quelle conduite à tenir ? (suite)


Après avoir soulagé son patient, l’urologue s’emploiera à rechercher une cause :

Les obstacles sous-vésicaux :
Adénome de prostate, cancer de prostate, sténose congénitale ou acquise du col vésical, calculs vésicaux, tumeurs de la vessie ou de l’urètre, valves de l’urètre postérieur ou phimosis chez l’enfant, sténose de l’urètre, compression par fécalome ou tumeur pelvienne…

Les causes neurologiques :
Paraplégie, syndrôme de la queue de cheval, sclérose en plaque, neuropathie diabétique, virale ou autres….

Les causes iatrogènes :
La rétention aiguë d’urine post-opératoire, bien connue des anesthésistes est la conséquence des produits à base de morphine utilisés, souvent favorisée par une rachianesthésie ou une péridurale, mais également des chirurgiens : chirurgie orthopédique ou neurologique, chirurgie proctologique.

Les causes médicamenteuses sont nombreuses :
Anticholinergiques et antispasmodiques, antiparkinsoniens, antihistaminiques, antidépresseurs, parasympathicomimétiques, etc.

un peu d'histoire...

« S’il arrive qu’un homme ait mal aux reins, s’il est faible et insensible, s’il a des rêves pénibles, si ses cheveux se hérissent et si son cœur bat sans raison, l’empêchant nuit et jour de trouver le repos, cet homme souffre de rétention d’urine »

Cette description, tout à fait d’actualité, a été écrite, il y a un peu moins de 3000 ans, par un médecin assyro-babylonien sur une des centaines de tablettes provenant de la bibliothèque d’Assurbanipal (qui régna de 668 à 630 environ avant notre ère) à Ninive en Mésopotamie.

 

 LA COLIQUE NÉPHRÉTIQUE

Qu'est ce que c'est ?


La colique néphrétique est la mise en tension soudaine de l’une des deux voies excrétrices urinaires supérieures (qui vont du rein à la vessie) par un obstacle, quel qu’en soit la cause.

C’est pourquoi la douleur siège soit du côté droit, soit du côté gauche, depuis la fosse lombaire, tournant dans le flanc et irradiant vers le bas, vers les organes génitaux.

La caractéristique majeure de la colique néphrétique (qui n’a rien à voir avec le colon) est la répétition d’accès douloureux très violents, entrecoupés d’épisodes d’accalmie.


La crise est souvent qualifiée de « frénétique »


Si l’anagramme est exquis, c’est aussi le cas de la douleur de la crise de colique néphrétique : Elle est extrême, paroxystique, spastique. Elle provoque une agitation et aucune position antalgique n’est susceptible de la calmer.

Une anecdote m’a souvent été rapportée par mes patientes de la gente féminine, qui comme chacun sait ont une certaine expérience
en la matière : «La douleur de la colique néphrétique est plus intense
que celle d’un accouchement ! ».


La colique néphrétique est-elle toujours
provoquée par la migration d’un calcul du rein ?


C’est, effectivement, la cause, de loin, la plus fréquente, mais pas la seule.

La lithiase urinaire ou calcul est la fabrication d’une petite « pierre » (la même qu’on trouve dans la nature) par une précipitation des composants de l’urine. Ce calcul de quelques millimètres, en général fabriqué dans le rein, va migrer dans la voie excrétrice et bloquer l’excrétion de l’urine.

C’est l’obstacle le plus fréquent. On parle d’obstacle intrinsèque, parce qu’il siège à l’intérieur de la lumière de la voie excrétrice, comme d’autres causes que sont les polypes, les tumeurs, les caillots de sang… par opposition aux obstacles extrinsèques qui compriment de l’extérieur la voie excrétrice : tumeurs notamment gynécologique ou digestive, fibrose rétro-péritonéale, après chirurgie ou radiothérapie.

Le diagnostic de la crise n’est pas toujours facile


Dans la majorité des cas le diagnostic est évident en raison de l’intensité et la localisation des symptômes ; parfois la crise est moins bruyante et peut simuler une pathologie digestive telle l’appendicite, la diverticulite sigmoïdienne ou gynécologique : torsion d’annexe ou grossesse extra-utérine.


Dans tous les cas, ce sont les examens
radiologiques qui confirmeront le diagnostic


La radiographie de l’abdomen sans préparation et l’échographie de l’appareil urinaire sont les deux premiers examens demandés qui permettent de voir les signes indirects de la crise (dilatation d’une voie excrétrice supérieure) et éventuellement de visualiser une lithiase.

Le scanner abdomino-pelvien non injecté, actuellement accessible dans la plupart des établissements médicaux français, est devenu le « Gold Standard » pour le diagnostic positif de lithiase urinaire.

C’est seulement en cas de doute diagnostique ou recherche d’une complication que l’on réalisera une injection intra-veineuse d’iode (urographie intra-veineuse et uroscanner) qui confirmera la nature et le type d’obstacle et son retentissement sur la fonction du rein.


Faut-il hospitaliser tous les patients victimes
de crise de colique néphrétique ?


Certainement pas !

La majorité des crises répond parfaitement aux antiinflammatoires et antispasmodiques prescrits par le médecin urgentiste. La douleur cède rapidement en y associant une restriction des boissons pendant la phase aigue. Il faudra, de toute façon, consulter rapidement un urologue.
Seuls trois cas induisent une hospitalisation dans une unité d’urologie :

• la colique néphrétique hyperalgique qui ne cède pas
à une première ligne de traitement médicamenteux,

• la colique néphrétique fébrile qui témoigne d’une
complication infectieuse

• la colique néphrétique anurique (pas d’urine émise)
qui témoigne d’un obstacle bilatéral simultané ou
sur rein unique et qui implique un drainage de la
voie excrétrice en urgence.

Quelques coliques néphrétiques célèbres
Jules César, Michel de Montaigne (De l’expérience), Henri IV, Thomas Bartholin, Jean Siméon Chardin, le conte de Mirabeau, Paul Cézanne, Antoine de Saint-Exupéry…

 

 LA TORSION DU TESTICULE

Véritable urgence chirurgicale urologique, il s’agit en fait de la torsion du cordon spermatique dans lequel cheminent les artères et les veines vascularisant le testicule. Cette torsion provoque une ischémie aigüe du testicule.

L’intervention doit être réalisée au plus vite (dans les six heures de préférence) sous peine de nécrose irréversible du testicule.

L’enfant, l’adolescent et l’homme jeune sont concernés, beaucoup plus rarement, l’homme mûr.
Le diagnostic est fait par l’urologue : la douleur est violente et brutale, elle est permanente et augmente les premières heures. Le testicule, ascensionné dans la bourse, est extrêmement douloureux à la palpation.

Une détorsion manuelle peut être tentée; mais seule l’exploration chirurgicale permet la détorsion puis la fixation bilatérale des testicules pour éviter la récidive.

 LE PRIAPISME

Quelle définition ?


Le priapisme, terme issu du grec signifiant « membre viril », est une érection du pénis anormalement prolongée (plus de 4 heures) et douloureuse, survenant en dehors de toute excitation sexuelle et n’aboutissant, en général, pas à une éjaculation ou ne cédant pas après celle-ci.



Un peu d’anatomie…


Le pénis est constitué de deux organes érectiles, les corps caverneux et du corps spongieux qui enserre l’urètre et se termine par le gland. Ces organes sont constitués d’un tissu équivalent à une « éponge » et d’une enveloppe. Lors d’une érection, ces corps se gorgent de sang (tumescence), la rigidité étant obtenue par la compression de l’enveloppe non élastique des corps caverneux. Dans le priapisme, le gland (corps spongieux) reste flasque.


Quelles en sont les causes ?


Bien que le priapisme soit relativement peu fréquent, les causes sont nombreuses : maladies du sang et troubles de la coagulation, maladies du système nerveux, certains médicaments, traumatismes et tumeurs … et parfois sans cause apparente.

Que risque-t-on en cas de priapisme ?


Si l’érection dure plus de 2 heures, elle devient douloureuse. Au-delà de 4 heures, les corps caverneux, gorgés de sang veineux, n’ont plus de vascularisation artérielle et par conséquent, leurs tissus meurent. Après la 24ème heure, le manque d’oxygène des tissus entraîne une impuissance totale et définitive.



C’est donc une urgence ?


Si le pronostic vital n’est pas engagé, le pronostic fonctionnel de l’organe pénien l’est ; et par conséquent, il faut agir avant la 24ème heure.

Traité tôt, le traitement médical suffit à guérir le priapisme veineux de façon simple et sans séquelle érectile.

En cas d’échec (non retour à la détumescence), le traitement sera chirurgical.



En conclusion


Toute érection douloureuse de plus de 4 heures doit faire consulter un Urologue en urgence sous peine d’une impuissance totale et définitive.